
Un digital nomad au temps de la pandémie
Bertrand Dour est e-resident estonien, entrepreneur et surfeur passionné. En activité depuis près de 20 ans, il a transformé ses acquis en un service en créant sa société 7 Flows. Il croit en la technologie et la créativité pour générer de la valeur. Il est parti du constat qu’il n’existait pas beaucoup d’approches complètes pour soutenir les entrepreneurs ou les intrapreneurs dans leurs démarches. Comme il travaille dans plusieurs pays d’Europe et voyage beaucoup son mode de vie repose avant tout sur la dématérialisation. Il avait donc besoin d’une solution simple pour gérer son entreprise à distance, ce qui l’a conduit à devenir e-resident estonien pour gérer sa société facilement quel que soit l’endroit où il se trouve.
Je lui ai demandé comment il a été impacté par les restrictions de déplacement dues à la crise sanitaire du coronavirus en Europe et ce que d’autres pourraient tirer de son expérience.

Betrand Dour
Est-ce que vous vous définissez comme un « digital nomad »?
C’est une question particulièrement intéressante. À la première lecture, la question m’a semblé simple. Le fait de ne pas y avoir répondu immédiatement m’a amené à réfléchir. Qu’est-ce qui définit un « digital nomad » en 2020, et plus particulièrement dans une période où notre liberté de mouvement est fortement contrainte.
Le premier mot qui m’est venu à l’idée, c’est « liberté ». Liberté de travailler où on le désire avec des partenaires partout dans le monde. Ayant un point de chute fixe, j’ai d’abord pensé ne pas être un véritable digital nomade.
Après réflexion, je pense que la notion de digital nomade fait plutôt référence à l’autonomie, la capacité d’exercer son métier depuis n’importe quel endroit du monde et la possibilité de travailler avec ses partenaires situés dans des pays différents. Dans ce cadre, je pourrais me définir comme un « digital nomad. »
2. Pourquoi avez-vous fait ce choix?
Le surf, la volonté de travailler avec des personnes et entreprises différentes, de découvrir des cultures différentes. J’ai fait ma première expérience du travail à distance en 2000, et j’ai depuis rarement travaillé dans un bureau.
La maîtrise du rythme de travail est également un point important pour moi. Les marées et les conditions de surf rythment ma journée plus que les réunions et les transports en commun. C’est simplement un mode de vie qui correspond à ce que je recherche vraiment, tout en me permettant d’être productif, efficace et flexible pour mes clients.
3. Quel a été l’impact de la pandémie sur votre mode de vie ?
Au risque de surprendre et peut-être déplaire, je trouve cette période extrêmement passionnante. Bien évidemment l’aspect sanitaire de la pandémie est extrêmement regrettable pour la plupart d’entre nous. Toutefois, c’est une période qui ouvre une immensité d’opportunités de repenser l’impact que l’on souhaite avoir, la façon dont on délivre de la valeur, les priorités et choses essentielles. Mon mode de vie a très peu changé, à l’exception du surf qui reste interdit sur les côtes françaises. Ma créativité et mon envie de découvrir et expérimenter de nouvelles choses n’ont cessés de croître depuis le début de la période confinement.
4. Pouvez-vous présenter votre activité professionnelle ?
J’ai toujours des difficultés à décrire mon métier. Mais cette période m’a aidé à trouver une description simple de mon activité : aider les entrepreneurs et organisations à façonner leur futur, maintenant! Je développe des cadres de travail, des modes d’organisation, des méthodes pour permettre aux entreprises de retrouver la culture de l’innovation qui a fait leur succès à leur création, de développer leur capacité d’adaptation, et de créer les produits qui rendront notre vie plus simple et agréable.
5. Quels sont les conséquences de la pandémie sur votre activité ?
Mon activité comme mon expérience du travail à distance ont eu un impact extrêmement bénéfique sur mon activité. Ce qui semblait exotique hier, est devenu normal aujourd’hui. De nombreuses entreprises m’ont proposé de collaborer pour améliorer leur capacité à travailler à distance et préserver leur activité. Ma propre activité est donc en extrême croissance durant cette période et le plus grand challenge à été de gérer cette demande et de trouver des solutions pour pouvoir apporter de la valeur au maximum de personnes.
6. Envisagez-vous de conserver certaines modifications dans votre méthode de travail après la fin du confinement ?
Absolument. La période de confinement m’a poussé à trouver des modèles d’accompagnement de mes clients plus performants, plus originaux, à créer de nouvelles expériences. Non seulement mon but est de conserver ces nouvelles approches mais aussi de continuer à les développer. Bien que le travail à distance et les modes d’organisation dits « office optionals » existent depuis plusieurs années au sein de sociétés comme Buffer, Zapier, Trello, ou Gitlab, nous n’en sommes qu’au début et il reste beaucoup de choses passionnantes à créer et développer.
7. Quels conseils donneriez-vous aux autres digital nomades dont l’activité a été très impactée ?
Observer, créer, se réinventer. J’ai pratiqué le snowboard en compétition durant de nombreuses années, et un jour un entraineur m’a dit: « si tu sens que ça va trop vite, accélère ». Actuellement nous vivons une période de changement à très grande vitesse. Essayer de se protéger, d’éviter la catastrophe en restant statique est très peu utile. Observer l’évolution du contexte, des usages, des besoins, pour réinventer la manière dont on peut délivrer de la valeur et créer une expérience unique pour ses clients et partenaires est à mon sens la meilleure, voire la seule chose à faire aujourd’hui. C’est en cherchant à attendre les objectifs qu’on évite au mieux les obstacles.
Violaine Champetier de Ribes – fondatrice de Digeetrips